Le manuel du Borderline

Posface du Dr Arlette Lecoq

Ce livre est polyphonique : trois auteurs, trois pays, trois approches pour une maladie complexe qu’on nomme borderline en anglais et état limite en français.

Sa polyphonie est géographique et nous mène de la Californie vers la Suisse et la Belgique ; mais elle est aussi conceptuelle et balaye des champs psychothérapeutiques aussi éloignés les uns des autres que l’approche comportementaliste, la mentalisation et la clinique analytique. L’unité qui parcourt néanmoins ce manuel tient dans cette volonté des auteurs de mettre à la disposition du lecteur, du patient ou du personnel soignant un outil performant, actuel, pointu et compréhensible par chacun, quelle que soit la conceptualisation envisagée.

À l’heure où la pensée se fait trop souvent simpliste et réductionniste, les auteurs ont réussi à conserver la complexité des notions déployées tout en les présentant de façon abordable à tous. Cette « simplexité » offre à l’esprit un éventail de facettes cliniques et de notions théoriques de qualité qui entrent en résonance avec le polymorphisme de cette affection.

Dans le champ analytique, honneur est surtout rendu à Otto Kernberg pour sa pensée innovante mais de nombreux auteurs européens ont aussi contribué à enrichir la réflexion, la théorie et à infléchir la technique en ce domaine. Les apports de Jean Bergeret, André Green et René Roussillon sont devenus incontournables dans l’approche de ces patients qui présentent des troubles narcissiques identitaires, des failles de symbolisation, des difficultés associatives et une clinique du négatif. Des progrès considérables ont été faits aussi dans le domaine du contre-transfert permettant à celui-ci d’être l’outil et le réceptacle privilégiés des expressions émotionnelles chaotiques et transférentielles de ces patients. Bien sûr, les travaux de Winnicott et de Bion avaient permis de développer, à côté de l’étude des mouvements intrapsychiques, toute la clinique relative à l’espace transitionnel et à l’influence de l’environnement et servirent d’étayage aux théoriciens des états limites.

La recherche est toujours en cours aussi du côté des expressions psychosomatiques et comportementales de ces patients qui envahissent nos divans, nos bureaux de consultations et nos hôpitaux de leurs souffrances indicibles.

Dr Arlette Lecoq, psychanalyste, Société belge de psychanalyse